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lundi, décembre 03, 2007

Carnet de Berlin 1

On quitte sa vie, son couple, son appartement, pour écrire un roman à Berlin. On part à l’étranger pour poursuivre une histoire, mais en vérité on ne s’éloigne ni pour imaginer la vie d’un autre, ni pour écrire un livre.

On choisit la solitude pour rompre avec d’anciennes formes, on vient ici pour s’avancer seul à travers l’informe ; des jours entiers on cesse d’attendre, de vouloir, d’inventer, de s’impatienter. Peu à peu, quelque chose arrive, on n’écrit toujours rien, la page reste blanche, mais à présent, on ne se concentre plus avec effort, comme auparavant, pour avancer: désormais, on se livre à cette avancée qui se fraie un passage en nous, on s’ouvre dorénavant à cette traversée qui nous emporte, nous oriente, nous conduit, on ne sait vers quoi ni où, nulle part peut-être, - le risque est toujours là, il n’y a aucun signe rassurant, nulle certitude -, quelque chose arrive cependant.

Peu à peu la vie se met à ruisseler au creux des sillons vides. Quelque chose arrive. Sans rien voir encore, le regard s’éclaire. Sans prendre forme, une force palpite. A cet instant, à cette seconde, on accepte, on est face à face avec le rien, on accepte d’être un homme inutile, vivant au bord du vide, dans la solitude et le silence, face à face avec ce rien sans lequel, pourtant, rien de vrai ne peut réellement émerger, rien de vivant ne peut véritablement être.

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